¡BLACKOLERO!

Frank Black, Black Francis, Pixies, Breeders

05 février 2006

III - De Black Francis à Frank Black (1990-1992)

Sorti en août 90, Bossanova se démarque nettement de ses prédécesseurs. Plus pop, plus calme, il a en outre bénéficié d’un budget important, qui s'est traduit par des sessions studio interminables (deux mois et demi en tout) et une production plus «propre». Les textes eux-mêmes, sans tomber dans les sentiers battus, traitent de sujets un peu plus accessibles et explicites, souvent empruntés à la science-fiction. Malgré (ou grâce à) cela, l'album, boosté par un single fluide et séduisant, Velouria, fait à son tour un carton dans les classements indépendants. Une longue tournée s’ensuit, qui confirme et asseoit l’extraordinaire popularité du groupe en Europe, notamment en Grande-Bretagne et en France.

De retour en studio début 91, les Pixies décident de prendre, une fois de plus, leur public à contre-pied en sortant un cinquième album rugueux, voire cradingue, en tout cas très différent du précédent. Charles lui a déjà trouvé un thème, l'espace, et un titre : Trompe le Monde (une trouvaille de Ken Goes, qui l'amuse beaucoup). Reste à écrire et à roder les chansons qui vont avec…

En fait, le problème n’est pas d’écrire mais plutôt de définir une orientation précise. Tenté par un rock franchement métallique, pour ne pas dire agressif, Charles a, d’un autre côté, très envie de recourir aux subtils claviers de son ami Eric Drew Feldman (Captain Beefheart Magic Band, Pere Ubu) pour se reposer un peu et renouveler le son Pixies. Marier ces deux ambitions sur un titre, ou même sur un disque, n’est pas chose aisée, et la plupart des nouvelles compositions esquissées avec Eric Drew Feldman finissent à la corbeille ou au placard. Petit à petit, Trompe le Monde s’oriente vers un punk-rock saturé qui ne satisfait que Charles et Joey, et encore, pas complètement.

La tournée Trompe le Monde démarre en France le 28 mai. La violence des nouveaux titres – et de la setlist en général – surprend et déroute tout le monde, même ceux qui s’y étaient préparés. Sorti au début de l’automne, l’album se vend moyennement bien en Europe et très mal aux USA, où le Nevermind de Nirvana cartonne au point d’éclipser toutes les autres sorties. Loin de se décourager, Charles décide de prolonger la tournée américaine, commencée en octobre. En février 92, les Pixies rejoignent le mastodonte irlandais U2 pour assurer sa première partie. Mais la foi n’y est plus, Kim a manifestement la tête ailleurs (les Breeders s’apprêtent à sortir un EP, Safari, en attendant d’enregistrer un deuxième LP) et, pour ne rien arranger, les fans de Bono n’accrochent visiblement pas au son des Bostoniens.

Ce calvaire dure deux mois, au terme desquels Charles annonce son intention de prendre une année sabbatique. Plutôt soulagée, Kim en profite pour réunir ses Breeders (qui incluent maintenant sa sœur jumelle Kelley à la guitare et Jim McPherson à la batterie) et entamer la tournée Safari qu’elle avait initialement prévue pour le début de l’année. Entre deux concerts, elle écrit les chansons du futur LP Last Splash.

Charles n’est pas inactif lui non plus. A peine libéré de ses obligations pixiennes, il retrouve Eric Drew Feldman – qui a pris part à la tournée Trompe le Monde – pour préparer avec lui son premier album solo. Nick Vincent (à la batterie) complètera l’effectif en studio.

Le 31 décembre 1992, Ken Goes reçoit un fax lapidaire de Charles, officialisant la fin des Pixies. Le manager refusant de jouer les intermédiaires, Charles apprend lui-même la nouvelle à Joey, qui mettra quelque temps à s'en remettre. Kim et David ne seront informés que plusieurs jours après.

Le scoop, en réalité, ne surprend pas grand monde : cela fait plusieurs semaines déjà que Charles, devenu Frank Black, fait la promo de son opus solo, clamant à qui veut l’entendre que Black Francis est mort et que les Pixies ne l’intéressent plus…

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