¡BLACKOLERO!

Frank Black, Black Francis, Pixies, Breeders

02 août 2009

Black vinyl

Un message tombé récemment dans notre boîte à lettres virtuelle (blackolero at gmail point com) soulève une question intéressante : quels albums de Frank Black / Black Francis sont disponibles en vinyle ?

Notre correspondant recherchait tout particulièrement Dog in the Sand et Black Letter Days. Mais le site de Cooking Vinyl (inutile de souligner le paradoxe) ne fait mention que de CD.

Au-delà de ça, j'avoue que je n'en ai pas la moindre idée. Mais je ne doute pas que les lecteurs de Blackolero constituent, sinon séparément, du moins ensemble, un véritable puits de science blackien. Nous attendons donc vos contributions !

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15 mai 2007

Dix ans de Frank Black par Charles Thompson

À l'occasion de la sortie, en juin prochain, du premier "best of" de Frank Black, le label Cooking Vinyl distribue à la presse cette interview dans laquelle notre homme revient sur les albums qui ont jalonné ses dix premières années en solo. Il était du devoir de Blackolero de traduire et de reproduire ce document in extenso...

Ma carrière suit une véritable courbe narrative. Ca a l’air bête à dire, mais en gros c’est ce qui se passe avec ces chansons : on peut me voir m’éloigner des Pixies et trouver mon identité solo, retrouver un groupe et reforger une alliance, puis le perdre ainsi que mon mariage, et finalement guérir de mon obsession de l’enregistrement direct sur deux pistes. La courbe est très nette.

Cette compilation-là ressemble moins au Best Of Blondie, à The Beatles 1962-66 ou au 20 Golden Greats and Rolled Gold des Beach Boys qu’au meilleur des Residents ! J’ai d’abord hésité quand mon manager m’a proposé de faire un "best of" : je ne suis pas vraiment connu pour mes tubes. D’un autre côté, ce n’est pas pour faire des tubes que je me suis lancé dans ce métier. Je voulais être un électron libre, faire partie de l’underground plutôt que du Top 50. Je voulais être un artiste et un musicien, pas être invité à des fêtes. Il faut être fidèle à ce qu’on est.

Mais j’ai beaucoup de chansons derrière moi et donc, pour les non-initiés, le Best of (1993-2003) est un bon point de départ. Il sonne comme un album normal de Frank Black, parce que tous mes disques sont un peu schizophrènes – une chanson rapide, une chanson lente, une chanson country, une chanson punky. Cela a beau être une banalité, il est vraiment représentatif de l’artiste que je suis !


FRANK BLACK (1993)

C’était excitant de faire mon premier album solo, même si j’ai subi pas mal de stress pour diverses raisons. Il y avait le split imminent des Pixies, et puis je venais d’acheter ma première maison et le chien des propriétaires précédents y avait laissé des puces partout, du coup mon batteur et mon ingénieur du son se faisaient bouffer tout vifs. C’était très gênant. Par ailleurs, j’avais décidé de me mettre au jogging au moment où je commençais à enregistrer cet album. Un jour, j’étais sur la plage à faire des échauffements, des étirements et tout à coup, mon genou se déboîte ! C’était si douloureux que je ne pouvais même pas marcher. Pendant l’enregistrement, je m’appuyais sur une canne en bois que j’avais dénichée chez un antiquaire. Les muscles de ma jambe gauche se sont carrément atrophiés ! C’était effrayant.

À part ça, c’était marrant. Je faisais de la musique d’une manière que je n’avais jamais approchée auparavant, parce qu’avec les Pixies, nous n’avions aucune idée de la façon dont on fait un disque, au moins au début. J’étais le grand patron et j’ai pris les choses en main ; même le pauvre Gil Norton, qui a produit les trois derniers albums des Pixies, pouvait à peine en placer une sans que je gueule "NON, JE VEUX ESSAYER CA !" J’étais soulagé d’être sorti de l’organisation Pixies, de pouvoir enfin expérimenter et apprendre à bosser en studio sans prendre tout le monde à rebrousse-poil. Sur le dernier Pixies, le producteur… tout le monde, en fait, était contre moi. J’étais si obstiné à propos de tout. Mais sur mon premier album solo, on était pour ainsi dire entre âmes sœurs : par exemple, il y avait Eric Feldman, que je respectais énormément et qui avait la même envie d’essayer des choses nouvelles.

Une partie de l’album était planifiée : j’avais commencé à enregistrer des titres à l’appartement d’Eric, à San Francisco, et ils sont devenus les maquettes du disque. Mais j’ai écrit une grande partie des paroles au café près du studio, très spontanément, juste avant d’aller les chanter. Si on écrit sous l’influence de la caféine et du manque de sommeil, sans aucune préparation, c’est sûr qu’on risque de se planter. Mais on peut aussi tomber sur d’heureux accidents, et ceux-là sont vraiment magiques.

Je n’avais encore enregistré aucune voix quand le patron de 4AD, Ivo Watts-Russell, a annoncé qu’il arriverait avec le prochain avion pour entendre ce que j’avais fait. Alors j’ai passé deux jours d’affilée sans dormir, à enregistrer les voix en préparation de sa venue. Je me suis endormi dans ce hamac que mon ex-femme avait apporté, et j’avais cette espèce d’écume blanche sur la bouche, comme un chien. Mais cette expérience avait quelque chose de très beau et d’exaltant. L’une des chansons que j’ai enregistrées dans ces circonstances était "Los Angeles", qui est devenue la plus connue de ce disque.

Pour le meilleur et pour le pire, j’avais enfin commencé à écrire des chansons plus personnelles. Non pas que les chansons des Pixies ne racontent rien ou ne veuillent rien dire, mais un grand nombre d’entre elles, en particulier les plus anciennes, étaient absurdes ou improvisées. Je ne passais pas beaucoup de temps sur les paroles, j’inventais un truc sur le moment. Mais j’ai fini par en avoir marre de faire du Jabberwocky. Je voulais écrire des chansons qui parlent d’un sujet précis. Alors, pour cet album, j’ai écrit une chanson d’amour aux Ramones, une autre sur la sous-culture ovni contemporaine... C’était des chansons qui avaient une signification.


TEENAGER OF THE YEAR (1994)

Certains disent que c’est mon meilleur album solo. Pourtant j’ai vraiment eu un gros blocage pour écrire les paroles. Pas pour la musique. Je m’entendais merveilleusement avec mon nouveau guitariste, Lyle Workman ; avec lui, pas besoin de répéter. Même chose avec le batteur, Nick Vincent. Entre ces deux-là et Eric, j’avais ce groupe vraiment expérimenté, et je pouvais écrire des chansons vraiment vite : je leur donnais une progression d’accords et ils en tiraient un arrangement à mon goût. C’était vraiment très excitant pour moi.

C’est pour ça qu’il y a autant de chansons sur cet album. Mais pour les paroles, je coinçais vraiment. J’avais pris l’habitude d’aller me balader dans les collines de Malibu avec ma Cadillac. J’écoutais de la musique, je jouais de la guitare. C’était une excuse : si je continuais à écrire de la musique, c’est parce que je n’arrivais pas à écrire de paroles ! Quand j’arrivais au studio, les autres me demandaient si j’avais écrit des textes, et je répondais "Non, mais j’ai une nouvelle chanson !" Finalement, l’ingénieur du son, Al Clay, et le coproducteur, Eric Feldman, ont décidé qu’on ne pouvait pas dépenser un centime de plus à enregistrer des accompagnements, et sans rien me dire – un coup de génie de leur part – un jour, à eux deux, ils ont écrit les paroles d’une chanson. Ils essayaient d’être moi : c’était un truc spatial, une histoire de science-fiction. Ils ne s’en sont pas vantés. Ils m’ont dit : "On essaie seulement de te stimuler." Eh bien, j’ai été foutrement stimulé ! J’étais horrifié ! "Non mais ça va pas ? C’est nul !" J’étais furax ! Est-ce que j’étais en colère parce que j’étais aussi facile à pasticher ? Peut-être que je n’étais pas encore conscient de mes propres clichés ou de l’image que les gens avaient de moi... C’était flippant, ou perturbant, je ne sais pas. En tout cas, je me suis précipité sur les hauteurs de Malibu ! La première chanson dont j’ai écrit le texte a été "Freedom Rock".

L’album a commencé à prendre forme quand je me suis mis à y incorporer l’histoire de la Californie, dans un style SF. Il y a plein de références à Los Angeles, au passé et au futur. Je reprenais la géographie que j’avais déjà utilisée dans Bossanova. C’est un peu comme si L.A. devenait pour moi ce que New York était pour Lou Reed : "La Californie, c’est moi !" La Californie est devenue ma matière première. D’où toutes ces références à l’histoire, à la politique, à la géographie, aux personnages – comme Mulholland qui a amené l’eau jusqu’à L.A. Si c’était assez bon pour Roman Polanski, c’était assez bon pour moi.


THE CULT OF RAY (1996)

Avec "Men In Black", on continue dans la SF. Avec "I Don’t Want To Hurt You (Every Single Time)", j’ai essayé d’écrire une simple chanson d’amour qui tourne mal, à la manière d’Elvis Costello. J’aime vraiment "You Ain’t Me" - pour être tout à fait honnête, elle a probablement été un petit peu inspirée par une personne de mon ancien groupe [rires]. À l’époque où j’ai écrit la chanson, elle venait de connaître un énorme succès [avec "Cannonball" des Breeders], et peut-être que je me sentais "culte", sans jeu de mot. J’avais à la fois le sentiment d’être un peu plus underground et une lassitude à l’égard du music business, de toutes ces mains qu’il fallait serrer. Non pas que j’aie fait des compromis sur la musique, mais déjà avec les Pixies il y avait toutes ces inquiétudes : comment avoir plus de succès, comment parvenir à faire des clips à gros budget, passer sur MTV, à la radio... Ce n’est pas pour ça que j’ai voulu faire ce métier.

Toutes ces histoires commençaient vraiment à me fatiguer, et j’ai réagi avec Cult Of Ray, où je m’efforce de ne pas du tout m’adresser au public. C’était un truc très personnel - "Je vais simplement faire un disque en prenant tout mon temps, je vais dépenser autant d’argent que je voudrai et planifier le moins possible, je vais le produire moi-même et tout faire de la manière dont j’aurai envie de le faire." Et donc, ce que "You Ain’t Me" voulait dire, c’était "je ne suis pas celui que vous voulez que je sois", même si c’était codé.

Sur le tournage du clip pour "Men In Black", on a rencontré les vrais "hommes en noir" dans le désert ! J’étais sur une colline en train de regarder l’équipe filmer les acteurs déguisés en men in black, quand tout à coup est apparu au-dessus de nous cet énorme hélicoptère noir qui ne portait pas le moindre numéro d’identification ! Je me suis dit : "Ouah, voilà les hommes en noir !" Et je me suis mis à me dire qu’ils me suivaient, genre "La CIA a un dossier d’un mètre d’épaisseur sur moi !"


FRANK BLACK AND THE CATHOLICS (1998)

Sur cet album, je suis accompagné par le même groupe qui a joué avec moi sur Cult Of Ray. On devait faire une démo pour Rick Rubin. Je venais de signer sur son label, et j’étais encore pas mal têtu à cette époque. On répétait en face du studio préféré de Rubin à L.A., Sound City, et le manager du studio nous a laissé entrer. Alors on a traversé la rue avec notre matos pour l’amener dans cet endroit où Nirvana a enregistré, où Tom Petty a fait Damn The Torpedoes... un vieux temple du rock’n’roll analogique, dans un vilain quartier industriel de la vallée de San Fernando. Comme on n’avait pas beaucoup de temps, quelqu’un a suggéré qu’on joue tout live et qu’on enregistre sur un deux-pistes, ce qui nous éviterait de perdre du temps au mixage.

Le deuxième jour, on était tous ravis parce que ça sonnait vraiment bien, très rock’n’roll. Le troisième jour, Rubin n’avait plus la moindre chance – on avait enregistré notre grand album, tout en live. J’étais sur un nuage. Il était si brut – on avait commencé à avoir ce son sur Cult Of Ray, mais c’était encore sur 16 pistes. Ça me plaisait d’avoir moins de pistes avec lesquelles travailler. Eric Feldman n’était pas là à l’époque : il y avait seulement deux guitares, la basse et la batterie. J’adorais ce son dur, macho, et on a tout fait en un week-end. J’ai dit, "Qu’est-ce que Rick Rubin va bien pouvoir faire avec ça que nous n’ayons pas fait ?" Scott, le batteur, a répondu "Tout ce qu’il peut faire c’est en sucer toute l’âme ! Tout rendre parfait, lisse et plus commercial, mais ça n’aura plus la même vibration." Au bout du compte, Rubin a dit que c’était vraiment une super démo, mais pas un super disque. Et c’est peut-être vrai. Mais les membres du groupes venaient tous du post-punk, ils avaient l’habitude de faire des disques à l’arrache, sans se soucier de les vendre ou de passer à la radio. C’était très anti-commercial. Alors, pour nous, faire un disque en un week-end, on se reconnaissait tous là-dedans. Oublie la caisse claire – c’est du rock ! Et c’est devenu mon truc pour un moment, tout a été enregistré en direct sur deux pistes jusqu’à Show Me Your Tears (2003), bien qu’on ait commencé à sonner plus country à ce moment-là. C’est presque devenu une religion, un parti-pris dans un monde de plus en plus envahi par la technologie numérique. Je ne voulais rien avoir à faire avec tout ça.


PISTOLERO (1999)

Celui-là sonnait aussi très brut. Ça balance bien. On n’a vraiment commencé à explorer le côté country que sur l’album suivant. Mais celui-là était brut de décoffrage, pas "lo-fi", mais le plus rentre-dedans possible. "Bad Harmony" était encore une chanson d’amour qui a mal tourné, mais bien plus agressive que "I Don’t Want To Hurt You". "Western Star" se rapproche, sinon musicalement, du moins par les paroles, de chansons comme "Calistan" ou "Los Angeles" : un paysage étrange et désertique, avec des références à la science-fiction et même à David Bowie. C’était un délire futuriste, même si je ne me rappelle pas sur quoi je délirais. J’ai tendance à entrer en transe quand j’écris des paroles. En concert, "Western Star" était sans aucun doute la chanson la plus populaire de cet album, avec ce passage "Yo soy un pistolero" ("je suis un porte-flingue") – je suppose que je me sentais comme un pistolero ! On prenait la route à quatre, sans ingénieur du son, sans roadies, on portait nos propres amplis, on jouait dans de petits clubs, on essayait délibérément de jouer dans des villes toujours plus petites : "On veut jouer à El Paso ! Trouve-nous une date au Nouveau-Mexique !" C’était excitant. Après les Pixies, ça m’a peut-être un peu vexé : l’enfant gâté qui tout à coup n’était plus personne. Mais au bout d’un moment, j’ai commencé à aimer ça. Genre "OUAIS ! Je m’en tape d’être populaire. Je fais des disques, je me balade d’un relais routier à l’autre dans ma camionnette, je joue dans des clubs, j’enregistre en live sur deux pistes... On est des durs !" J’aimais vraiment ça. "Je suis un pistolero ! Je suis un vrai dur à cuire !" On chargeait et déchargeait notre matériel plus vite que n’importe qui. On avait même arrêté de faire des balances ! On branchait les amplis l’après-midi, on revenait à minuit et on jouait, sans setlist, aussi fort et aussi longtemps qu’on pouvait... C’était presque méditatif : "On va faire du rock, on va faire du rock, on va faire du rock. On chargera la camionnette plus vite que n’importe qui, on ira plus loin que n’importe qui, on jouera dans les clubs où personne d’autre ne joue." On était devenus comme ces moines bouddhistes qui marchent, s’allongent et se relèvent jusqu’à développer ces espèces de nodules sur leurs os. Ce n’était pas une philosophie comme le "straight-edge". C’était simplement de la musique, mais débarrassée de tout le baratin.


DOG IN THE SAND (2001)

On a eu quelques rares plaintes à propos du fait que, si sur scène on assurait vraiment, nos disques, par contre, n’étaient pas très produits. Ça m’a plutôt donné envie d’aller encore plus loin sur cette voie, par défi. Mais je me suis quand même demandé comment les polir un peu plus. "Je sais, on va demander à quelques potes de venir jouer avec nous. On aura une jolie guitare carillonnante ici, un peu de percussion là, et puis un peu de piano pour adoucir le tout. Mais au lieu de mixer tout ça, on va jouer comme un seul groupe de sept ou huit personnes."

On se préparait à une autre de nos tournées "macho" à quatre dans la camionnette, quand Rich Gilbert s’est amené avec sa pedal steel, qu’il voulait essayer dans notre local de répétition de Rhode Island. Et dès qu’il a commencé à jouer de cet instrument magique... "Wow !". Ç'a été une révélation. C’était comme si une femme magnifique était entrée dans la pièce avec une harpe : un son divin, pas seulement le son de la musique country, mais de toute la musique occidentale, les débuts du rock'n'roll. C'était un son très cinématographique. Il l'a donc testé sur toutes les chansons, puis nous avons été rejoints par un autre guitariste, Dave Philips, qui joue aussi de la pedal steel, Eric Drew Feldman est revenu aux claviers, Joey Santiago et Morris Tepper étaient là... Rich a commencé à changer d'instrument pendant l'enregistrement, pour créer un son encore plus riche. Et la plupart du temps, ça marchait. On a réengistré à Sound City et là, on avait un beaucoup plus gros son, beaucoup plus riche que les deux disques précédents. Ce n'était plus aussi bricolé et punk. Ça nous plaisait.


BLACK LETTER DAYS (2002) et DEVIL’S WORKSHOP (2002)

On était devenus obsédés par la Californie. On avait enregistré à San Fernando, un quartier peuplé de Latinos, où les gens vous parlent automatiquement en espagnol. Et Sound City n'était pas très loin, alors on y allait avec nos burritos qu'on mangeait à la Mission catholique. C'était un endroit plein de sérénité. J'étais aussi devenu obsédé par une autre chanson d'amour perdu, "Sister Isabel" de Del Shannon. J'étais là avec toutes mes obsessions – cette chanson, l'histoire de Los Angeles, l'enregistrement sur deux pistes – et elles se sont toutes mêlées dans ma décision d'enregistrer sur la route, dans un studio mobile ! Je voulais enregistrer dans la "vraie" Californie, faire le tour des 22 missions qui ont fondé l'État, en commençant à San Diego et en terminant à San Francisco. La moitié de ces missions se trouvent dans des villes connues, mais l'autre moitié est dans des zones rurales. San Francisco, L.A. ont été bâties à partir de ces missions, avec la sueur des Indiens, la brutalité des soldats espagnols et l'Église catholique. Je suis devenu obsédé par El Camino Real – "le chemin royal" – qui relie toutes ces missions. Je voulais jouer dans toutes ces villes et y enregistrer, avec un équipement analogique, des amplis d'époque. Donc j'ai passé six mois avec un ingénieur du son dans un studio désaffecté de Sound City, et j'ai créé mon propre studio mobile. On louait un camion, on le chargeait, on trouvait un endroit et on s'installait.

Nous avons enregistré Black Letter Days dans un loft situé dans un immeuble branché de Japantown. On enregistrait, puis on faisait une pause pour manger japonais – c'était le paradis. Mais je voyais arriver le moment où nous serions éjectés à cause du bruit, donc nous avons déménagé le matériel – il a fallu six heures pour tout démonter. Nous avons quitté l'immeuble à 4 h 30 du matin et la section rythmique et le guitariste m'ont accompagné dans ce grand espace de répétition industriel que j'avais déjà utilisé seul et avec les Pixies, et nous avons terminé l'enregistrement là. On dit que le disque a un son enterré, pas très clair : c'est dû en partie aux sols en béton de cet endroit, et en partie au fait que c'est comme ça que sonne la musique rock.

Je voulais sortir deux disques en même temps. Je ne voulais pas en faire un, puis publier l'autre trois mois après. Et ça ne collait pas de mettre toutes les chansons sur le même disque, d'abord à cause des différences de son, et ensuite parce qu'elles avaient été enregistrées avec des musiciens différents. Et puis, je ne voulais pas garder ces chansons sous le coude pendant un an. Je n'avais pas la patience pour ça. C'est peut-être ça, mon défaut.

On a passé beaucoup plus de temps à faire Black Letter Days, et j'avais fait beaucoup de démos avec des musiciens de Beck et quiconque passait par là. Quand on a commencé à enregistrer les démos avec les Catholics, tout avait été pensé à l'avance. C'était un disque beaucoup plus planifié que Devil's Workshop qui, par contraste, contenait beaucoup plus d'échos du passé, des bouts de musique écrits des années auparavant, des morceaux de mélodie ou des progressions d'accords que j'aimais beaucoup, mais que je n'avais jamais trouvé le moyen d'enregistrer.

De l'avis général, Black Letter Days est le meilleur disque et Devil's Workshop est le mouton noir. Les deux albums ont leurs fans, mais je crois qu'il y a plus de variété sur Devil's Workshop, bien qu'il soit plus court.

Je trouve qu'on accorde un peu trop d'importance à la production de nos jours. Le rock, ce n'est pas un super son de batterie. Les disques n'ont pas besoin d'avoir un son parfait. Tous les disques ne sont pas obligés de sonner comme ceux de Steely Dan ou de Roxy Music (et j'adore Steely Dan et Roxy Music !). Devil's Workshop est le moins populaire de mes disques avec les Catholics, mais c'est mon préféré.


SHOW ME YOUR TEARS (2003)

Nous avions besoin d'un nouvel endroit pour enregistrer. Il a fallu se rendre à l'évidence : trimbaler le matériel d'une ferme à une école abandonnée était cher et difficile. Nous avons donc décidé de chercher un emplacement plus permanent, comme le loft à Los Angeles, et j'ai trouvé un studio vide à Hollywood. Van Dyke Parks est venu jouer un soir, et d'autres gens allaient et venaient : j'aimais bien cette idée d'avoir un entourage, un peu comme les Rolling Stones, des gens qui venaient faire un tour et taper le boeuf avec nous. On travaillait avec deux producteurs différents, Nick Vincent et Stan Ridgway, chacun avec son style particulier. J'adorais ça !

Le revers de la médaille était que tout mon univers était en train de s'écrouler : le groupe, mon mariage... En fait, pendant que j'enregistrais certaines de ces chansons, mon ex-femme me disait : "Charles, ces chansons sont un peu... Qu'est-ce qui se passe ? Est-ce que je devrais m'inquiéter ?" Et je répondais "Oh, non non non ! Ce sont seulement des chansons." Mais, évidemment, elle avait raison. Même si je n'en étais pas conscient, je n'écrivais pas ces choses-là par hasard.

Comme je l'ai dit, le groupe aussi était au bord de la séparation. Nos disques se vendaient peu, et faire partie de Frank Black & the Catholics devenait une situation précaire. Le groupe en avait assez d'enregistrer sur deux pistes, et ils se disaient que si je travaillais avec un producteur et que j'enregistrais sur un multipistes, avec des corrections etc., dans un vrai studio, je ferais quelque chose de plus lissé, de plus produit, ce qui n'était pas faux.

J'aime vraiment ce disque. J'étais à la fois triste et heureux : heureux parce que j'étais parvenu à faire passer ce qui m'arrivait dans mon art, ce qui est toujours satisfaisant. Et ma tristesse était plus humaine, c'était celle d'un membre de l’espèce humaine qui vivait des expériences intenses et voyait se terminer une longue relation. C'était lourd, mais je n'étais pas seul, car je suivais une thérapie. Le titre est venu d'une chanson qui n'a finalement pas été intégrée au disque : elle parle de montrer ses émotions, notamment devant un public.

Lorsque je criais, avec les Pixies, c'était plus primal. C'était l'expression de ma confusion. Show Me Your Tears parle d'exprimer ses émotions, mais d'une manière plus poignante, plus profonde et sans se cacher derrière l'abstraction. "Massif Central" était une chanson prophétique qui décrivait ce que je ferais dans un futur proche : "Je vais quitter les USA, m'installer en France, trouver une nouvelle femme et vivre dans le Massif central, ce lieu solitaire et envoûtant." Cela reflétait mes sentiments : heureux et hanté, seul mais plein de vie. Mais finalement, je ne suis pas allé en France : j'ai rencontré cette fille au beau milieu de l'Oregon, et c'est là que je suis aujourd'hui. Donc, comme vous pouvez l'imaginer, cette chanson signifie beaucoup pour moi.

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19 janvier 2006

Pixies : Bootlegs

Il existe des quantités de bootlegs pixiens, d'une qualité et d'un intérêt très variables. J'ai limité cette liste à ceux que je possède (les meilleurs ou du moins les plus connus). On trouvera des inventaires plus complets sur Alec Eiffel, Debaser et Velvety.

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All Over the World (Newcastle Polytechnic, GB, 23/04/89 - Pink Pop Festival, NL, 15/05/89 - Cabaret Metro, Chicago, 10/08/89) ***
27 titres, 75 mn

Un bootleg décent et généreux, mais peu varié : de nombreux titres y figurent deux, voire trois fois. A noter que les extraits des concerts de Newcastle et Chicago sont disponibles sur d'autres boots de meilleure qualité, Timeless Stars et Velouria Live.

The B-Side File 3rd Edition *****
29 titres, 70 mn

Toutes les faces B du groupe et une dizaine de raretés en prime : cette compilation bien connue surclasse facilement les Complete B-Sides de 4AD (2001).



Frank Black : The Dream Is Over *****
25 titres, 58 mn

Une très belle performance solo de Black Francis, probablement enregistrée entre Doolittle et Bossanova et diffusée après la «naissance» de Frank Black en 1993 (d'où son intitulé). A noter que ce bootleg clairement électrique est également sorti sous le titre trompeur de Black Stool Acoustic.

Give Me Ecstasy *****
29 titres, 72 mn

Ce bootleg de haute tenue réunit seize démos de l'ère Doolittle, aussi rares qu’intéressantes, et treize titres live enregistrés à Liverpool le 3 mai 1989. Sans doute le boot le plus précieux après le légendaire Rough Diamonds (voir plus bas).

Gone to Heaven (Los Angeles, 22/12/1991) ****
18 titres, 48 mn

Une setlist équilibrée et plutôt inhabituelle : on y trouve notamment Distance Equals Rate Times Time, Lovely Day et Letter to Memphis, ainsi que deux excellentes b-sides, Manta Ray et Dancing the Manta Ray (rebaptisée Mental Dance sur la pochette !). Le son est correct.

Rough Diamonds *****
31 titres, 73 mn

Ce bootleg mythique donc très recherché offre presque exclusivement des versions studio rares (voire introuvables ailleurs), enregistrées entre mai 1988 et septembre 1991 et tirées, pour la plupart, des placards de la vénérable BBC. Le son est généralement excellent. Une pure merveille.

Situation Red (Floride, 1992 - vraisemblablement Lakeland, 29/02/92) **
14 titres, 43 mn

L’un des derniers concerts du groupe avant sa séparation. La setlist a la particularité d’inclure huit titres de Trompe le Monde - un record ou presque. C’est hélas le seul intérêt de ce bootleg dont la qualité sonore laisse nettement à désirer.

Subbacultcha (Festival de Leysin, Suisse, 11/07/91) ****
23 titres, 64 mn

Une setlist dense et variée : tous les albums, de Come On Pilgrim à Trompe le Monde, y sont représentés, qui plus est de façon équitable. Le son est correct.



Timeless Stars (Newcastle, GB, 23/04/89 - Town & Country Club, Londres, 01/05/89 - John Peel Session, 03/05/88) ****
18 titres, 45 mn

Un boot de très bonne qualité mais qui a perdu beaucoup de son intérêt avec le temps : la John Peel Session de mai 88 est aujourd'hui disponible sur l'album Pixies at the BBC (1998), le concert au Town & Country Club a été intégré au DVD Pixies (2004) et les deux inédits offerts en bonus (Down to the Well et Rock a My Soul) ne sont plus inédits depuis longtemps...

Velouria Live (Utrecht, NL, 25/09/91 - Chicago, 10/08/89) ****
16 titres, 41 mn

Un bon bootleg, hélas un peu court.

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18 janvier 2006

Pixies : Compilations

Sorti en 1997, quatre ans après la séparation du groupe, le double album Death to the Pixies inclut un best of de dix-sept titres - presque tous extraits de Come On Pilgrim, Surfer Rosa et Doolittle - et un live d'excellente qualité, enregistré à Utrecht (Pays-Bas) le 25 septembre 1990. Aujourd'hui épuisé, il est avidement recherché par les fans, probablement moins pour son contenu sans surprise que pour son double boîtier, fort élégant, et son artwork furieusement pixien...

Plus riche mais guère plus audacieuse, la compilation Wave of Mutilation - Best of Pixies, apparue quelques mois après la réunion du groupe en 2004, comprend vingt-trois titres, dont quinze tirés des trois premiers albums et six des deux derniers (cherchez l'erreur). Une fois de plus, fort bizarrement, Bird Dream et Motorway to Roswell, les deux joyaux de Trompe le Monde, passent à la trappe. La seule originalité de ce best of est d'offrir deux b-sides judicieusement sélectionnées, Into the White et Winterlong.

Comme leur titre l'indique platement, les Complete B-Sides (2001) rassemblent toutes les faces B du groupe, soit vingt-et-une chansons au total. Les nouveaux fans désireux d'élargir leur culture pixienne y trouveront très certainement leur compte, et même plus. Les anciens, pour leur part, se cramponneront à l'excellent bootleg The B-Side File 3rd Edition, nettement plus généreux et plus varié...

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17 janvier 2006

Pixies : Singles

Je ne juge pas utile de commenter ces singles car, d'une part, ils sont tous bons (voire excellents), et d'autre part, je suis plutôt du genre flemmard. Je précise néanmoins que j'ai un petit faible pour les b-sides de Monkey Gone to Heaven et Here Comes Your Man, ainsi que pour les deux reprises de Neil Young qui agrémentent Velouria et Dig for Fire.

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Gigantic
(GB, 1988)

1. Gigantic
2. River Euphrates
3. Vamos (live)
4. Heaven (Peter Ivers / David Lynch) (live)





Monkey Gone to Heaven
(GB et USA, 1989)

1. Monkey Gone to Heaven
2. Manta Ray
3. Weird at my School
4. Dancing the Manta Ray






Here Comes Your Man
(GB et USA, 1989)

1. Here Comes Your Man
2. Wave of Mutilation (UK Surf)
3. Into the White
4. Bailey’s Walk






Velouria
(GB et USA, 1990)

1. Velouria
2. Make Believe
3. I’ve Been Waiting For You (Neil Young)
4. The Thing





Dig for Fire
(GB et USA, 1990)


1. Dig for Fire
2. Velvety (instrumental version)
3. Winterlong (Neil Young)
4. Santo





Planet of Sound
(GB, 1991)

1. Planet of Sound
2. Theme from Narc
3. Build High
4. Evil Hearted You (Graham Gouldman)



Alec Eiffel
(GB et France, 1991)

1. Alec Eiffel
2. Motorway to Roswell
3. Planet of Sound (live)
4. Tame (live)




Motorway to Roswell
(France, 1991)

1. Motorway to Roswell
2. Alec Eiffel
3. Planet of Sound (live)
4. Tame (live)






Alec Eiffel
(USA, 1992)

1. Alec Eiffel
2. Letter to Memphis (instrumental version)
3. Build High
4. Evil Hearted You (Graham Gouldman)





Head On
(Japon, 1992)

1. Head On (William Reid / Jim Reid)
2. Motorway to Roswell
3. Planet of Sound (live)
4. Tame (live)





Head On
(Canada, 1992)

1. Head On (William Reid / Jim Reid)
2. U-Mass
3. Planet of Sound (live)
4. Tame (live)
5. Debaser (live)

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16 janvier 2006

Pixies : Albums live & DVD

Si le sixième album studio des Pixies se fait attendre, on frôle plutôt l'overdose côté live puisque tous les concerts des tournées 2004 et 2005 ont été instantanément gravés sur CD, par DiscLive puis par PixiesDiscs. Bien que sortis en édition limitée, tous ces albums ne sont pas encore épuisés, et la plupart de ceux qui le sont se dénichent assez facilement sur Gemm, eBay ou ailleurs.
Les deux seuls albums live officiels de l'ère «Pixies I» (1987-1992) sont sortis assez tardivement sur le label 4AD. Le premier, inclus à l'édition française du best of Death to the Pixies (1997), propose un concert enregistré à Utrecht le 25 septembre 1990. Le second, Pixies at the BBC (1998), rassemble diverses sessions enregistrées sur le mythique plateau de John Peel entre 1988 et 1991.
A ces albums il convient bien sûr d'ajouter les DVD Pixies (2004), Pixies Sell-Out (2005), Acoustic: Live in Newport, Live at the Paradise in Boston et loudQUIETloud (2006), incluant tous des concerts - ou des extraits de concerts - de l'ère «Pixies II».

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15 janvier 2006

Pixies : Albums studio

Come On Pilgrim (1987)

Un rock à la fois brut et subtil qui emprunte un peu à tout le monde sans rien devoir à personne, des textes étranges et érudits aux allures de miniatures surréalistes : d’entrée de jeu et en seulement huit titres remarquables de concision, les Pixies imposent leur style unique et, par la même occasion, une poignée de futurs classiques : Caribou, Isla de Encanta, Ed Is Dead, The Holiday Song, Nimrod’s Son.




Surfer Rosa (1988)

Adieu les bonnes manières, oubliée la retenue qui freinait (un peu) le premier opus : la bande à Black se lâche et se fâche. Résultat, treize titres toujours aussi courts – beaucoup n’atteignent même pas les deux minutes –, treize explosions en chaîne qui, miracle, réussissent chacune à éclipser la précédente. Le groupe tient désormais son arme d’assaut (Bone Machine, intro idéale à l'univers pixien) et le public son hymne chéri (Where Is My Mind, lancinant en diable).



Doolittle (1989)

Non content de concilier la finesse de Come On et la vitalité de Surfer Rosa, le troisième album du gang de Boston manifeste une invention et une diversité stupéfiantes. Balancés en douze minutes chrono, les cinq premiers titres à eux seuls – du fulgurant Debaser au délicat Here Comes Your Man – enterrent à coups de talon tout ce que le rock des eighties a produit depuis la séparation des Clash. Plus que le chef-d’œuvre d’un groupe doué, un album historique.



Bossanova (1990)

L'énergique tandem surf-punk (Cecilia Ann / Rock Music) qui ouvre l’album semble promettre le déluge. Fausse piste : les titres suivants – Velouria, Is She Weird, Dig for Fire, pour ne citer que les plus remarquables – s’aventurent résolument dans des contrées plus pop, nettement plus civilisées que celles explorées jusque là. Signe de maturité… ou de fatigue ? Force est de constater que la deuxième moitié du disque donne parfois des signes d’essoufflement. Un très bon opus tout de même, sans doute le plus accessible des cinq.


Trompe le Monde (1991)

Ode rugueuse à l’espace et à ses héros terriens ou autres, «TLM» – comme l’appellent les initiés – renoue sans vergogne avec les muses du punk-rock. On est pourtant loin de Surfer Rosa et de Doolittle : ici, à quelques évidentes exceptions près (les magnifiques Bird Dream et Motorway to Roswell), le charme naît moins des mélodies, pourtant bien présentes, que de la vitesse et du bruit, voire du chaos (Planet of Sound, The Sad Punk, Head On). Un album épineux mais intense, à apprivoiser.


Pixies (2002)

Clairement marginal dans la discographie du groupe, ce mini-album réunit les neuf chansons (sur dix-sept) que 4AD n'a pas voulu intégrer à Come On Pilgrim. A une exception près (Rock a My Soul, pas vraiment indispensable), tous ces titres ont été réenregistrés et «casés» par la suite. Une curiosité à réserver aux fans purs et durs.

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07 janvier 2006

FrankBlackFrancis

De tous les albums de Frank Black, ce double opus très contrasté, réunissant quinze démos de l'ère Come On Pilgrim (1987) interprétées en solo par l'artiste et treize perles pixiennes revisitées par le duo électro-pop déjanté des Two Pale Boys, est certainement celui dont j'attendais le moins. Sorti en 2004, en pleine tournée des Lutins, il me semblait a priori plus dicté par l'opportunisme que par autre chose, d'autant que le précédent album de Frank Black, l'ambitieux et coûteux Show Me Your Tears, s'était mal vendu. En fait, comme l'indique le livret, il s'agit d'un projet très ancien, que le père Black lui-même a longtemps hésité à concrétiser malgré les pressions de ses labels.
Première bonne surprise : les démos, pourtant enregistrées dans les conditions d'un bootleg, présentent une qualité sonore tout à fait correcte. Surtout, elles restituent pleinement le talent et l'inspiration de leur auteur, à tel point qu'on peut se demander pourquoi celui-ci a tellement hésité à les rendre publiques.
Le deuxième disque, quant à lui, fait plus que remplir sa fonction de bonus. Complètement retravaillés par Andy Diagram (trompette, effets électro) et Keith Moliné (guitare, violon, effets électro), les classiques pixiens perdent inévitablement de leur fougue mais conservent et affirment toute leur audace et leur étrangeté. On pense parfois à Tom Waits, et ce n'est pas peu dire. Mention spéciale à Caribou, Monkey Gone to Heaven, Into the White et au monumental Planet of Sound, qui s'étend ici sur quinze minutes (!).
En conclusion, s'il ne s'impose sans doute pas comme un must, FrankBlackFrancis mérite certainement mieux que l'étiquette de curiosité un peu vaine qu'on lui a souvent et hâtivement collée...

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06 janvier 2006

Frank Black : Bootlegs

N.B. : Cette liste pas tout à fait exhaustive ne mentionne que les bootlegs que je possède moi-même.

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No Big Deal (Moore Theatre, Seattle, 30/05/93) ***
18 titres, 66 mn

A ma connaissance, le tout premier boot de Frank Black (le titre fait assez explicitement référence au sabordage des Pixies). Secondé par Eric Drew Feldman et Nick Vincent, l’artiste y interprète la totalité des titres de son premier album, plus Freedom Rock, This Is Where I Belong des Kinks et quelques instrumentaux (dont le thème de la vieille série fantastique One Step Beyond) en intro. Le son, stable mais plutôt lointain, est tout juste acceptable.

Black Is Beautiful (Tower Theatre, Houston, 05/07/93) *****
19 titres, 65 mn

Même setlist ou presque, dans un ordre différent. Le quatrième titre, curieusement intitulé War, n’est autre que Tossed. Le son est très bon.



Los Angeles 1993 (The Palace, Hollywood, 14/07/93) ****
14 titres, 59 mn

Même setlist que précédemment, moins Brackish Boy, Ten Percenter et This Is Where I Belong. Son tout à fait correct.



The Return of Fu Manchu (Ventura Theatre, Ventura, 15/07/93) ***
12 titres, 40 mn

Setlist un peu courte mais son correct.



Hate Me (Wetlands, New York, 13/06/94) *****
24 titres, 77 mn

Le seul boot (je crois) de l’ère Teenager of the Year. La setlist, généreuse et pleine de surprises, inclut notamment la b-side At the End of the World, Speedy Marie (une rareté en live), Handyman d’Otis Blackwell et The Man Who Was Too Loud. Le son frôle la perfection. On fermera les yeux sur les titres fantaisistes donnés à certaines chansons…

Tune In, Turn On, Black Out (Commodore Theatre, Vancouver, 23/04/96 + Lorelei Festival, Allemagne, 22/06/96) ****
21 titres, 73 mn

Un boot énergique et intéressant, qui reprend (à peu de choses près) les meilleurs titres des trois premiers albums. Dommage que le son ne soit pas tout à fait à la hauteur, notamment sur les seize premiers titres, enregistrés à Vancouver.

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05 janvier 2006

Frank Black : Compilations

Oddballs (2000)

Une compilation de b-sides et de raretés couvrant la période 1994-1996. On s'en doute, tout n’est pas brillant dans ce recueil aux allures de fourre-tout. N’empêche, le niveau moyen de l’ensemble est tout à fait honorable – nul doute que bon nombre de fans trouvent ce disque plus varié et plus emballant que Pistolero, par exemple. Au rayon des réussites incontestables, il faut citer le lancinant Man of Steel, écrit pour les X-Files, et les quatre bonus tracks qui agrémentaient la première édition européenne du Cult of Ray : Village of the Sun, Baby That’s Art, Everybody Got the Beat et le sublime Can I Get a Witness, qui annonçait avec cinq ans d’avance le virage country-folk de l'artiste.


One More Road for the Hit / Snake Oil (iTunes, 2006)

Deuxième compilation de b-sides, ce double album de 23 titres couvre l'intégralité de la période Catholics (1998-2003). Si vous rechignez à débourser les 20 euros réclamés pour son téléchargement intégral, contentez-vous d'acheter One More Road, qui aligne les perles comme le poignant Preacher's Daughter (tiré d'un autre album virtuel, le Show Me Your Tears EP), le très délicat et très dylanien Pan American Highway (titre-phare du LP avorté Sunday Sunny Mill Valley Groove Day, curieusement reconverti en b-side sur un single confidentiel), le ludique Pray for the Girls (tiré de la soundtrack des Powerpuff Girls) et ce petit bijou de country-rock speedé qu'est Valley of Our Hope, exhumé de l'édition japonaise de Pistolero.

Bien qu'agréable, Snake Oil - exclusivement composé de reprises - s'avère globalement moins inspiré et plus brouillon. Nul doute toutefois que les vrais fans de l'artiste se précipiteront sur Belle Isle (signé Dylan) et Some Things (obscur brûlot d'un groupe californien qui ne l'est pas moins, Angst), deux cuts inédits et plutôt attachants de l'ère Devil's Workshop.


93-03 (2007)

Après une dizaine de LP généralement sous-estimés, Frank Black méritait certainement une compilation, capable non seulement de synthétiser son œuvre mais d’élargir son public, notamment en direction de l’énorme – et souvent frileux – fan-club des Pixies. Si la question de la légitimité ne se posait donc pas, celle du contenu, en revanche, relevait a priori du casse-tête : comment résumer en un album une discographie aussi imposante ? Et bien sûr, comment convaincre les vieux fans d’acheter ce best of ?...

Cooking Vinyl a tranché la première question en puisant principalement dans les trois premiers albums de l’artiste, réputés les plus populaires et les plus audacieux. On commence donc le festin avec une généreuse brochette de classiques inaltérables (
Los Angeles, Abstract Plain, Calistan, Speedy Marie, Freedom Rock, Headache, Men in Black), pour le finir avec quelques titres de l’ère Catholics, parfois incontournables (Western Star, Robert Onion, Massif Central), parfois très discutables : on se demande comment des réussites aussi évidentes que Billy Radcliffe, St. Francis Dam Disaster ou His Kingly Cave ont pu passer à la trappe au profit du fadasse Bad Harmony et du tapageur Hermaphroditos

Côté bonus,
93-03 assure l’essentiel : outre une hidden track en béton (Threshold Apprehension, locomotive du futur LP Bluefinger) qui devrait aisément séduire le fan-club mentionné plus haut, il propose neuf titres enregistrés avec Duane Jarvis, Eric Drew Feldman et Billy Block lors de la tournée américaine de 2006. Si l’interprétation manque un peu de finesse, on saluera par contre la qualité de l’enregistrement, très honorable, et une tracklist plutôt culottée, mêlant des petits classiques (Bullet, Nadine), des reprises tonitruantes (mention spéciale à l’obscur That Burnt Out Rock’n’Roll) et une b-side judicieusement exhumée (Living on Soul).

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